JUILLET 1593.                              46?
l'election du duc de Guise, comme venante du ciel : auquel ils donnerent une infinité de louanges.
Au contraire les mal contents de son election disoient que c'estoit un roy sans forces, sans argent et sans nés; que madame de Montpensier se plaingnoit qu'il chioit ordinairement au lit de ses damoiselles ; que ses chevaux mouroient tous les jours, faute de foing; et qu'on en voyoit ses housses et manteaux en gage, pour lui avoir à soupper.
Le éuré de Saint-Germain prescha cé jour que com­bien qu'il eust été esleu et arresté roy, toutefois qtfil ne seroit point proclamé ni sacré que quand l'armée d'Hespagne seroit proche.
A ce sermon on eust de la peine beaucoup à foire taire deux simples femmes qui ergotoietit l'une contre l'autre sur ceste election; et en ouist-on une qui dit tout haut : « Enfin nous ne saurions avoir qu'un roi; « si nous en avons deux, il faudra faire faire une gaine « exprés, où on mettra ces deux cousteaus : l'un poititu, «c et l'autre moussu. »
Ce jour, le curé de Saint-André alla voir M. le pre­sident Le Maistre, et lui dit qu'il avoit esté marri d'entendre que lui, qu'il avoit tousjours tenu pour bon catholique et homme de bien, eust assisté à ce mes­chant arrest de la cour, et qu'il en eust donné le con­seil comme le trouvant bon. Au quel le president Le Maistre respondit qu'il y avoit voirement assisté, et donné conseil ; et que pour cela il ne s'en estimoit moins catholique ni homme de bien; au contraire, que l'ar­rest estoit si bon, si saint et si juste, que s'il estoit encores à faire, il seroit d'avis de le faire; et qu'il n'i avoit que les meschans qui le trouvassent mauvais. v                                                            3o.
Digitized by